La  Bibliothèque  de  la ShinRa  corp.

 

 

 

Le Chaos qui est en Moi

 

 

Chapitre II : Retrouvailles

 

Le froid d’une tombe. Derrière la cascade, la lumière du jour ne pouvait soutenir le combat contre les ténèbres. Assis dans un coin de la grotte, Vincent se pelotonnait, les bras entourant ses jambes repliées, sa joue posée contre ses genoux joints.

Il s’était drapé dans sa cape mais tremblait. Etait-ce à cause du froid ? Lui-même n’en savait rien.

Ses cauchemars avaient recommencé. Il n’en avait plus fait après s’être joint à l’équipe de Clad. Il avait alors naïvement pensé que sa conscience lui disait qu’il avait enfin trouvé le moyen d’expier ses fautes… Il s’était bercé d’illusions ! En vérité, ce n’était pas pour expier ses fautes, encore moins parce qu’il était animé d’un désir altruiste de sauver le monde d’une menace imminente qu’il s’était joint à l’équipe. C’était de vengeance, de vengeance contre son tortionnaire Hojo, dont il s’était agi. Oui, à présent il s’en rendait compte. Comme il s’était trompé, trompé sur toute la ligne ! "Maintenant, repose en paix, Hojo", peuh ! Vincent retroussa le nez d’un air dédaigneux.

Et au lieu d’alléger ses péchés, il n’avait fait qu’alourdir son fardeau. Et cette force maléfique en lui, qu’il contrôlait difficilement, c’était sa croix à porter. Sa punition… Qu’il avait été stupide de croire qu’un sommeil, même long de plusieurs décennies, aurait pu expier ses fautes passées ! Non, même la mort n’y suffisait pas…

 

 

*****

 

 

« - Docteur, je l’ai enfin retrouvé !

- Quoi donc, votre stéthoscope ?

- Non. Clad !

- Pardon ?

- Clad, Clad Strife! Votre miraculé de la Rivière de Vie, je l’ai retrouvé ! Il est éleveur de chocobos dans la région des Prairies. Je vais l’appeler pour lui parler de notre "patient X".

- Que ferais-je sans vous, Vincent ! »

 

 

*****

 

 

Les mots avaient eu tellement de mal à sortir. J’avais tout préparé à l’avance, j’avais même préparé mon discours par écrit, sur un morceau de papier, et je l’ai appris par cœur. Je l’ai invitée pour une promenade, et à la sortie de la ville, j’ai respiré un grand coup, et je me suis lancé, et… rien n’est sorti, aucun mot de ma longue tirade préparée à l’avance, rien d’autre que… "je t’aime, Lucrécia"

J’ai cru mourir lorsqu’elle a retiré ses mains des miennes et s’est enfuie, au bord des larmes. Je croyais que je lui faisais horreur, ou peur… Je, je ne comprenais pas.

Le lendemain, j’ai compris. Hojo et elle, elle et Hojo…

Je n’avais jamais eu l’intention de la faire pleurer. Pour rien au monde. Je ne voulais que son bonheur. Même auprès d’un autre… ce n’était pas grave. Si elle était heureuse, mon sort n’avait aucune importance.

 

Les cauchemars ont recommencé. Je n’aurais jamais dû revenir dans ce village maudit, dans cette demeure vétuste et sinistre, où tout a commencé, et tout a fini pour moi. Pourtant, je ne pouvais résister. C’était comme une force magnétique qui m’attirait, me rappelait vers cette petite ville déserte. Hojo était éliminé, la Shin-Ra était discréditée et sera bientôt oubliée par tous, les espions dans Nibelheim n’avaient plus lieu d’être. Alors ils ont quitté la ville, et j’ai retrouvé le Nibelheim d’antan, désert, à l’abri des regards entouré de ses hautes montagnes. Je crois que la ville est comme moi, oubliée et solitaire. Et cela vaut mieux ainsi, pour tout le monde.

Les cauchemars ont recommencé, différents, et plus effrayants encore, si possible.

Mes cauchemars d’avant me revenaient de mon passé. Les cauchemars de maintenant m’annonceraient-ils mon avenir ? Je ne veux plus dormir à présent, j’ai trop peur de rêver.

Ma grande faute a été de voir et de ne pas agir. A présent, dans mes rêves, j’agis mais ce n’est pas moi. Ce ne peut pas être moi, non, je ne suis pas là !

 

 

*****

 

 

« - Quelqu’un sait où est Vincent ? Il n’est pas là, avec nous.

- Non, soupira Clad, j’ai essayé de le joindre à plusieurs reprises. Mais je pense qu’il a débranché son récepteur PHS. Peut-être même qu’il l’a jeté. Peut-être qu’il ne veut plus nous voir… Il semblait bouleversé, quand… lorsque j’ai tué… enfin, quand tout ça s’est terminé.

- Cela ne m’étonnerait pas de sa part. Je veux dire, de ne pas vouloir nous revoir, fit un Barrett bougon.

- Il était quand même assez bizarre, et croyez-moi, je m’y connais en bizarreries ! s’exclama Cid.

- Oh, plaida Red, il n’était pas plus bizarre qu’un autre de notre équipe. »

Le fauve sourit, fouettant doucement l’air de sa queue rouge-braise.

« - Regardez-nous, continua t-il d’un ton doux, un ex-SOLDAT présumé promu clone raté puis sauveur de l’humanité, un mineur qui s’est fait écolo-terroriste affublé d’un bras-fusil, une hôtesse de bar championne d’art martiaux, une ninja voleuse de matéria…

- Quoi ? Je ne suis pas une voleuse ! s’écria Yuffie. Clad était d’accord, il m’a signé un papier et comme promis, il m’a donné la matéria après notre dernier combat ! »

Clad approuva mollement, Red poursuivit comme si de rien n’était : « … un pilote d’avion avec "la tête dans les étoiles", une peluche qui parle – et sait se battre ! (Reeve se racla la gorge au mauvais moment) Oh, pardon, j’oubliais : et son inventeur, que dis-je, la "voix de sa conscience". (Reeve fit un sourire gêné, ne sachant pas comment il fallait prendre cela) Et enfin, moi : un sujet de laboratoire portant le numéro 13, un fauve parlant ! Rassurez-vous, je suis un "spécimen" très particulier ! »

Il y eut un soudain silence à la table et des rires gênés.

« Je crois qu’il nous manque à tous, n’est-ce pas ? » fit Clad.

Tous approuvèrent d’un air sérieux.

 

Tifa alla rejoindre Clad qui était sorti de la salle de réception.

« - Dio m’a dit qu’il allait faire tirer des feux d’artifices en notre honneur.

- …

- Tu m’écoutes, Clad ?

- … hein ? Pardon, tu me parlais ?

- A quoi, ou à qui penses-tu ? »

Elle baissa les yeux et la voix :

« - …à Aeris ?

- Non… Je ne repensais pas à elle. »

Il se retint d’ajouter : « car je ne l’ai jamais oubliée. »

Il se rapprocha de Tifa. Elle tourna les yeux vers le ciel étoilé. Il faisait bon sur cette terrasse.

« - Tu t’inquiètes pour Vincent alors, c’est ça ?

Il approuva d’un mouvement de tête.

- Mais je ne sais même pas où il est, alors ça ne sert à rien que je me ronge les sangs… J’ai pensé qu’il était peut-être à Nibelheim ?

- Je sais que c’est notre ville natale, mais je n’ai aucune envie d’y remettre les pieds.

- Je te comprends, Tifa. Et je crois que Vincent pense comme toi, alors… »

Alors, ils rentrèrent en se tenant par la main et refermèrent la porte-fenêtre.

« M’accorderais-tu cette danse, Tifa ? »

Tifa accepta l’invitation de Reeve et ils se mêlèrent aux autres couples de danseurs. Clad tira une chaise dans un coin de la salle et s’assit. Ses yeux se posèrent presque immédiatement sur Tifa.

Elle semblait s’amuser follement, elle riait aux plaisanteries de Reeve et ils dansaient, virevoltaient dans un froissement de satin, de satin de la jolie robe rouge de Tifa.

« - Ouh, j’ai la tête qui tourne ! riait Tifa

- On peut s’arrêter un moment, si tu veux ?

- Non, je ne me suis pas amusée à ce point depuis des siècles !

- La fête est très réussie, je te félicite.

- Oui, tout le monde a l’air de s’amuser. Cid n’a pas dit de juron depuis au moins cinq bonnes minutes, ça veut dire qu’il est joyeux.

- C’est parce qu’il est avec Shera ! »

Tifa le regarda incrédule, Reeve insista :

« - Je t’assure, Tifa. Je suis bon observateur…

- Et psychologue ?

- Oh, je n’irais pas jusque là. Ils sont faits l’un pour l’autre, mais…

- Mais ?

- Reeve soupira -

- Ils ne se l’avoueront jamais.

- Pourquoi ?

- Pour ne pas compromettre leur amitié platonique, parce qu’ils croient être trop différents, que sais-je… »

Tifa baissa les yeux d’un air mélancolique.

Reeve la regarda et jeta un coup d’œil à Clad dans son coin. Ce dernier détourna son regard lorsqu’il s’aperçut que Reeve l’observait.

« J’en connais deux autres qui sont dans le même cas… » pensa Reeve.

 

 

*****

 

 

Vincent fut extrêmement surpris – c’est un euphémisme – de la revoir. Elle n’avait pas changé : les mêmes yeux verts rieurs, la même queue de cheval châtain qui se balançait à chacun de ses mouvements, et cette même blouse blanche de scientifique, la seule chose qu’il n’aimait pas en elle, en fait. Elle se tenait là, si près de lui qu’en tendant la main, il pourrait la toucher.

Et il tendit la main, en effet. Mais au lieu de son bras droit, ce fut sa main gauche qu’il avança vers elle. Une main mécanique aux doigts d’acier, recourbés comme… des crochets à viande, acérés comme la lame d’un Masamune…

Il crut l’entendre crier, mais non : elle ne bougea pas, ses yeux seuls s’agrandirent d’effroi. Et lorsque sa bouche s’entrouvrit, ce fut pour rendre son dernier souffle. Elle s’effondra aux pieds de Vincent. Il baissa les yeux vers ses mains. Elles étaient, toutes les deux, couvertes de sang. Un sang rouge vif comme sa vieille cape, et comme la vie qui s’écoulait de Lucrécia.

Il tressaillit et les yeux grands ouverts, scruta l’obscurité de sa chambre. Puis ses yeux s’habituèrent à la pénombre et il put distinguer le plafond à la peinture écaillée. Un cauchemar de plus. Chaque nuit, un nouveau cauchemar. Sa vie en elle-même n’était-elle pas un long, douloureux cauchemar ?

Il avait cru qu’un tel rêve l’aurait réveillé en sursaut, l’aurait peut-être fait s’asseoir sur son lit, haletant et pris de sueurs froides. Mais en fait, non. Il s’était juste réveillé un peu plus brutalement que d’habitude. On s’habitue à tout, même au malheur… Et son malheur, il l’avait mérité. Il avait cru qu’elle pourrait être heureuse en ménage. Après tout, qui était-il pour juger Hojo ? Un simple Turk qui obéissait à des ordres, il devait assurer la confidentialité des recherches des professeurs Gast et Hojo et de leur assistante ; et pas tomber amoureux de cette assistante. Il n’avait pas le droit de franchir cette limite. Et elle avait parfaitement le droit de lui préférer un autre… Non ! En tant qu’ami qui se souciait d’elle, il aurait dû la prévenir du danger encouru. C’est ce qu’il avait fait, il avait émis son désaccord. Mais ce qu’il pensait n’avait eu aucun poids face à un "scientifique" comme Hojo. Maintenant qu’il y repensait, une haine sourde se réveilla en lui. Il la rejeta au plus profond de lui-même, elle finit par se taire…

Le professeur Gast n’était pas au courant bien entendu, il s’était absenté, et Hojo avait profité de leur crédulité à Lucrécia et à lui. Elle voulait protéger Hojo de lui-même, de sa propre folie qu’elle devinait, et elle pensait que son mari se souciait plus d’elle que de cette expérimentation. Lui, pensait qu’elle était heureuse avec cet homme.

Pourquoi avait-il fait ce rêve ? Etait-ce là le signe qu’il se tenait toujours pour responsable de tout le mal qui était arrivé à Lucrécia et à son enfant ? Peut-être l’explication venait du fait que dans une semaine, il se dirait "voici un an tout juste que j’ai aidé à tuer le fils de celle que j’aimais, de celle que j’aime toujours". Il avait eu cette sensation étrange dans la Grotte Nord. Oui. Il sentait qu’en combattant – et peut-être en tuant – Séphiroth, il portait un coup fatal à Lucrécia. Il aurait voulu être mort pendant ce combat. Mais il ne pouvait mourir, même s’il le voulait. Et pourtant il le voulait. Car il le méritait : il n’avait rien pu faire pour empêcher le malheur de frapper celle à laquelle il tenait plus que tout. L’année dernière, il avait été impuissant à l’aider, tout comme il n’avait rien pu faire non plus, vingt-cinq ans avant cela.

"Et un enfant naquit à Lucrécia, le nom de cet enfant est…"

 

 

*****

 

 

« - Séphiroth ! s’écria Tifa, au téléphone avec Clad.

- Quoi ?! intervint Barrett.

Tifa lui fit signe de se calmer et poursuivit sa conversation avec Clad.

- Ce n’est pas possible, Clad. Il ne peut pas être vivant. Tu l’as… Oui, je sais, c’est ce que je dis : il ne peut pas être en vie ! Que dis-tu ? Maintenant ? OK, j’arrive… et Barrett aussi. Ne discute pas ! C’est décidé, on ira avec toi ! Tu as téléphoné aux autres ? Bien, mais fais-le tout de suite après ; ils ont le droit de savoir. Oui, je pense qu’ils voudront venir aussi. On se retrouve chez toi. A tout à l’heure… »

Elle raccrocha et s’assit sur une chaise.

« Il faut que nous retrouvions Vincent ! » décida Tifa.

 

 

*****

 

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